Le contact avec les civils allemands ...
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Ce contact quotidien avec les civils allemands forme un des traits les plus originaux de la vie des kommandos. Les relations les plus diverses s'établissent ainsi et aux rapports de force ou d'intérêt entre employeurs et prisonniers viennent s'ajouter des traits plus humains. Les premières semaines de la captivité sont souvent marquées par la rigueur et. l'âpreté du comportement des Allemands ; l'orgueil de la victoire les incite souvent à profiter d'une situation qu'ils jugent définitive. D'où les cris, les injures, parfois les violences physiques. L'obstacle de la langue aggrave encore les rapports.
Entre l'incompréhension réelle et l'incompréhension voulue, entre l'ignorance et la mauvaise volonté, l'Allemand, au départ, n'hésite pas : le paresseux doit être mis à la raison par la rigueur. Il suffit toutefois de quelques jours pour que l'employeur, le contremaître sachent reconnaître ceux qui leur paraissent les meilleurs travailleurs. Sans que cela ait souvent beaucoup de résultat, ils tentent alors de les encourager, de les stimuler par une cigarette, un morceau de pain. Mais les rapports entre prisonniers et Allemands s'établissent surtout par d'autres voies. Sans nouvelles des leurs, coupés de toute information, les captifs sont à l'affût des nouvelles. D'invétérés optimistes s'obstinent à rêver d'une prompte libération. Sur les chantiers, dans les usines, dans les champs un obscur dialogue s'instaure. Ceux qui ont quelques connaissances d'allemand tentent de se faire comprendre avec des phrases incorrectes et cherchent à saisir le sens exact des réponses. Ces conversations, qui coupent le travail, allongent la pause, traduisent à la fois l'inquiétude des uns et des autres devant le conflit qui s'éternise et l'expression d'un nationalisme.
Aux victoires allemandes les prisonniers opposent les charmes de la vie française et commencent à construire l'image d'un pays de cocagne. Ainsi se nouent, traversées de querelles et de crises sans cesse transformées par l'humeur et la fatigue, d'involontaires relations où se mêlent de façon indissociable la haine et l'estime, l'intérêt et la générosité, l'envie et le mépris, le calcul et la spontanéité.
Étroitement surveillés dans les premiers mois de la captivité, les prisonniers, peu à peu, se verront accorder ou sauront prendre quelques libertés. Ces hommes jeunes ou dans la force de l'âge ne peuvent pour la plupart être totalement insensibles aux présences féminines. Le donjuanisme n'est-il pas d'ailleurs un des traits de caractère dont le Français se targue le plus? Il se croit donc volontiers séducteur et expert dans les jeux de l'amour. Les règlements interdisent les rapports entre prisonniers et Allemandes pour des raisons où se rencontrent les préoccupations raciales, le souci de protection des familles et le respect de l'ordre public. Bien que durement sanctionnées lorsqu'elles sont découvertes par les autorités, les aventures se multiplient. Il est difficile de dire si elles naissent d'une initiative du prisonnier ou de sa complice, si elles relèvent d'une sexualité élémentaire ou de sentiments, en tout état de cause, respectables.
Peu de kommandos, toutefois, ont ignoré passades, brèves rencontres ou liaisons si durables qu'elles ont pu se prolonger après 1945. Les archives de la police allemande, les dossiers des tribunaux contiennent matière à statistiques. La littérature et le cinéma ont déjà exploité quelques-unes de ces situations.
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